Durant cette saison 2014/15, la croche est partenaire d'un autre sport international : la canne de combat (sous l'égide du Comité Régional de Canne de Combat et de Bâton Réunionnais) ; elle aussi implantée sur l'île de la Réunion depuis plus d'un siècle. C'est d'ailleurs sur l'île de la Réunion que la canne de combat a connu ses premiers championnats du monde, en 2004 ... avec (déjà) la croche en sport de démonstration.
En nommant notre association sportive et culturelle "Ligue de Croche et Disciplines Associées", nous exprimons notre volonté d'ouverture :
- tant sur le plan culturel, en montrant notre volonté de nous approcher des musiciens traditionnels (voir pages 43 et 44 du livre "La croche, lutte traditionnelle réunionnaise", éditions Azalées, 2006),
- que sur le plan ludique et sportif, en créant des relations avec des pratiquants d'autres jeux "lontan" qui sont recensés et décrits (liste non exhaustive) pages 42, 43 et 48 du livre "La croche, lutte traditionnelle réunionnaise" (des jeux pas forcément sportifs d'ailleurs).
Extraits du livre : (téléchargeable à l'adresse : http://www.fila-official.com/images/FILA/livres/LTAF05/LTAF05.pdf )
Pages 43-44 : Parallèle entre la croche et la musique traditionnelle
Un de nos doyens, Mr Adrien Duriés (88 ans) fit le premier un parallèle entre « La Croche » et la musique. « La Croche était une activité de distraction, comme on joue de la musique ». A son époque (milieu des années 30), pour quelques familles, l'une des seules distractions était d'ailleurs déjouer du Maloya (musique créole d'origine africaine utilisant divers instruments tels que le « kayamb »(grand hochet en roseau), le « rouleur »(gros tambour à main) ou le « bob »(arc musical). Mr Jean-Pierre Joséphine, musicien, chercheur (sur les musiques de l'océan Indien) ... et ancien « crocheur » aujourd'hui âgé de 42 ans, nous a lui aussi apporté sa contribution.
Voici son analyse.
Le Maloya est, comme le Moringue, d'origine afro-malgache et donc pratiqué par une population de type « cafre » ou « malgache » (ce qui de nos jours est moins ciblé au niveau de l'origine ethnique des pratiquants de par le métissage et l'évolution socio-culturelle du peuple réunionnais). Le Séga, comme « La Croche » est avant tout le métissage (blanc, noir, malbar.). Cette fusion musicale est née de la rencontre entre un apport principalement rythmique afro-malgache et un apport mélodico-harmonique européen. Ces deux musiques ont un ancêtre commun : le « tséga » ou « tchéga ». Au niveau instrumental : - D'un côté, le Maloya est resté proche du tronc originel avec des percussions d'Afrique de l'Est et de Madagascar, voire de l'Inde (sati, « tambours malbars »). - De l'autre, le Séga s'est mélangé. Les accords, les mélodies, les instruments des « tits créoles » (comme le banjo, le violon, l'accordéon) issus de l'Europe sont venus rejoindre les rythmes de l'Afrique et de l'Inde. Compte tenu de cela, « La Croche » représente un symbole pour la Réunion car elle en est, entre autres, le reflet : celui du métissage de tous les peuples, au même titre que sa musique (et du Séga en particulier).
Pages 42-43 : Parallèle entre la croche et les jeux "lontan"
Plusieurs jeux anciens ont été décrits, dont certains ignorés par des réunionnais quadragénaires des familles même de nos témoins :
- « le maire » a continué,
- « cachette » a disparu,
- « toupie » a disparu ... quoiqu'il soit en regain de mode mais avec toutes sortes de gadgets électroniques bien loin de la toupie d'antan !
- « cadok » (sorte de jeu d'osselets avec des graines de « cadok »),
- « vavangue » (ou « zagat ») « comme la pétanque mais à trois trous »,
- « 'bite » : jeter une première pièce autour du trou, si dedans, on ramasse,
- « macatia » : empiler des pièces, (aussi un petit pain local de boulangerie)
- « jeu la roue » qui a traversé le temps avec les produits de récupération successifs : avec un bâton pour jouer au cerceau s'il s'agit d'une roue de vélo ou deux bâtons s'il s'agit d'un pneu de voiture,
- « le couru » (ou « délivrer ») jeu physique de délivrance de camarades
- etc.
Quelques exemples ont été détaillés.
Dans « le couru » deux équipes s'opposent. L'une doit capturer des proies, l'autre se sauver et délivrer ses membres quand ils sont capturés. Pour capturer une proie, il faut la ceinturer (debout) et compter à haute voix (ou en tapant sur le corps avec le plat de la main) : « 1, 2, 3 ! ». Pour délivrer son camarade, retenu dans une aire définie (un rond dessiné), il suffit de lui toucher la main. Au bout d'un temps donné, on compte combien les attaquants ont fait de prisonniers puis on change de rôle. L'équipe gagnante sera celle qui aura totalisé le plus de prisonniers.
Le « jeu zagat » peut être apparenté aux jeux de boules (pétanque, lyonnaise, etc.). Jadis, on lançait le fruit de goyave vert dur à deux mains jointes soit avec l'intérieur de la main (« la viande ») soit avec le dessus (« le zo », c'est- à-dire l'os). Il y avait trois trous alignés, cibles de ces lancers. C'était un jeu de précision.
Si nous voulons conserver le lien social et lutter contre certains méfaits du modernisme qui conduisent aux incivilités et à la violence, il est sans doute urgent de revaloriser ces jeux traditionnels qui liaient les enfants et les adolescents aux valeurs ancestrales. « La Croche » s'intègre tout à fait dans cette mission.
Page 48 : Disciplines hybrides
Mr Duriés (natif de Saint-Pierre puis arrivé à Savannah en 1936-37, « crocheur » de 1925 à 1940, soit de 10 à 25 ans) nous a décrit plusieurs versions des «jeux » ou plutôt rudes sports d'opposition à la Réunion :
- sans coup de poing (de la lutte pure, debout et au sol, c'est-à-dire la Croche)
- avec « des épaulettes ». Il s'agissait de « branchettes posées sur les épaules. Si on l'attrape, on va à terre. ». En définitive, c'est une forme de lutte avec frappes mais où le coup n'est pas porté sur le visage mais sur une cible symbolique). Selon d'autres sources, « les épaulettes, c'était de la bagarre, pas La Croche ».
- et avec coups de poings [et de pieds, etc.] (de la lutte avec frappes).
Il existait donc aussi une forme de croche avec frappes, une sorte de "croche bagarre" ou "croche bataille" ! Ce serait intéressant d'approfondir avec des témoignages d'anciens, de "gramounes" comme on dit à la Réunion.
RépondreSupprimerCe serait également très intéressant de se rapprocher d'associations travaillant à la revalorisation de jeux anciens, typiquement réunionnais.
RépondreSupprimerSans oublier les musiciens de séga, de maloya ou de salegy ...
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